Pour une débénabarisation du quotidien #130-135

Un nouvel épisode du feuilleton poétique de votre hiver (la contribution précédente du #123 au #129 par Greg Damon c’est ici) :

130) Ça crame. Il y a des jours où des mecs en crament d’autres. Et ils filment. Ils filment puis montent les images. Font des ralentis. Des incrustations. Et font une réalisation tape-à-l’œil-du-plus-faible-et-fox-news qu’ils mettent en ligne. Ça se diffuse tout seul. On dit nous avons décidé de ne pas vous montrer les images du mal. On dit nous avons décidé de ne pas vous montrer les images du mal. On dit nous avons décidé de ne pas vous montrer les images du mal. Mais à force de le répéter, et bien un mal grandit quand même. Il infuse puis se disperse. Opération commando. En ligne.

131) Quel est l’équivalent contemporain de la ligne Maginot de 1940 ?

132) Quelles sont les lignes à ne pas franchir ? On veut savoir. Parce qu’on a l’impression qu’en la matière, il y a pas mal de fluctuations. Certains peuvent. D’autres non. Selon les passifs, l’actualité ou les thèmes électoralistes. On voudrait savoir. Ce n’est pas pour chercher la merde. C’est pour vivre sans être inquiété de ce qui pourrait

133) tomber.

134) J’ai des enfants.

135) Ça caille. Il y a des jours comme aujourd’hui où la ville neige de droite à gauche. Le vent. De droite à gauche. Ça ne tiendra pas. Mais on sort tout de même – debout – une trace de morve sur la veste au niveau de l’épaule.

Pour une débénabarisation du quotidien #118-122

L’épisode précédent de la débénabarisation du quotidien (du #111 au #117) c’est ici, sur le blog de Grégoire Damon. La suite écrite à l’instant c’est là :

118) tard c’est compliqué, les yeux qui piquent ;

tard le silence se déporte ;

tard ailleurs ;

tard ailleurs c’est proche ;

tard c’est à la fois la fatigue du jour et celle du lendemain ;

tard seul dans le salon qui veille ;

tard tu dors ;

tard on prépare l’avenir devant l’ordi ;

tard on boit à la bouteille, les verres sont dans la cuisine et la cuisine est trop loin ;

tard demain c’est très proche ;

tard jag är stel i nacken ;

tard tu tousses dans ton sommeil malade ;

tard le périph’ est vide ;

tard je le vois depuis ma fenêtre ;

tard frisson ;

tard pas de froid mais de fatigue ;

tard à force de préparer l’avenir ;

tard je me suis assis sur le potentiel de situation ;

tard j’ai le cul tout raide ;

tard bizarre pour un cul ;

tard c’est peut-être le signal pour aller m’aplatir contre la ronfleuse ;

tard à demain, même heure, même bouteille.

119) Une véritable guerre s’est déclarée durant notre sommeil. Ça doit bien les faire marrer maintenant les sonneurs d’alarmes. Enfin… Pas marrer. Pire. Depuis des années que leurs bras se soulèvent, certains ont-ils renoncé à leur engagement ? D’autres voient-ils dans l’actualité un nouvel élan ? Sentiraient-ils que les puissants seraient enfin prêts à les soutenir ? Les sonneurs d’alarmes. Acteurs associatifs. Habitants. Agents de proximités. Certains artistes. Journalistes indépendants. Un iceberg vient d’émerger. A l’écran. Uniquement à l’écran. Les vivants, eux, savaient.

120) Et de nouveau, une étrange intuition que des têtes vont tomber. Pas les bonnes. Que les défenses se dressent. Autour de nous. Qu’à vouloir des enfants libres. On les veut parfaits. Qu’à force de créer des explications. On découvre notre fragile équilibre. Notre complexité. Une étrange intuition que des fenêtres s’ouvrent. Mais que les serrures se ferment. Que des forces sont en mouvements. Depuis, depuis, depuis. Que le progrès du monde n’a pas de mémoire. Que l’on cherche un mode d’emploi. Alors qu’il s’agit uniquement de vivre. Vivre et tenir. Debout. Pas d’emploi. Qu’après des siècles de littératures et de philosophies, certains en sont encore à se poser des questions déjà résolues. Que les mots se vident. On les épuise. Qu’on les dérègle à force de les crier. De les exploiter. De les débiter. De les. De les. Un mot comme une petite Terre sur laquelle on vit à crédit.

121) Réveil. Je me réveille. Oh merde. C’était quoi ça ? La ronfleuse, t’es où ? Dans la salle d’eau, tout va bien. Chez nous. Je suis chez nous. Chérie, tu me croiras jamais, j’ai rêvé que je parlais comme…

122) RECOMMENCER. Et s’y TENIR.

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Pour une débénabarisation du quotidien est une liste écrite par Grégoire Damon (son blog) et moi à suivre sur nos blogs respectifs. Les nouvelles lectrices et nouveaux lecteurs trouveront des explications ici.

Pour une débénabarisation du quotidien #101-105 et #106-110

Pour une débénabarisation du quotidien du #101 au #105 par Grégoire Damon c’est ici. La suite écrite ce matin par mes soins, c’est juste là :

106) TENIR. REFAIRE. Tenir et refaire. Tenir en refaisant. Refaire en tenant. Woua la langue est riche quand même. Tellement riche qu’elle coûte chère. Qu’on s’en serve ou qu’elle nous empêche.

107) TENIR. Je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain. Hop tous ensemble « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » ouais c’est ça, allez les amis plus fort « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » je ne vous entends pas « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » tous ensemble « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » youhou « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » unis « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » qui parle de dictature du rire ? « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » faisons du bruit « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » réveillons nos collégiens indignes « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » Nicolas, Pimprenelle, vous aussi « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » oui il y a école aujourd’hui, mais aujourd’hui est un jour spécial « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » bruit bruit « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » bruit bruit « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » bruit bruit « je te tiens, tu me tiens par le quotidien ; le premier qui rira vivra mieux demain » OK c’est bon pour aujourd’hui. Demain, on fera la même, mais sans prononcer les voyelles.

108) TENIR. Debout dans le bruit du plat écran qui est le mien. TAPER ON VEUT SE TAPER ET FAIRE LA PAIX ET FAIRE LA PAIX EN SE TAPANT ET SE TAPER CONTRE LES MOTS DES AUTRES CAR LES AUTRES NE PARLENT PAS COMME ON ET QUE SI ON NE PARLE PAS COMME ON BEN ÇA POURRAIT DIRE QU’ON EST CONTRE IL FAUT VÉRIFIER SI L’AUTRE EST CONTRE ALORS ON TÂTE LE TERRAIN AVEC DES QUESTIONS QUI N’EN SONT PAS ON CONTRÔLE L’AUTRE POUR SAVOIR SI ON PEUT PARLER LIBREMENT VULGAIREMENT COMME LORS D’UN REPAS DE FAMILLE ES-TU DE MA FAMILLE CAR IL Y A UNE FAILLE DANS LA FAMILLE QUAND ON NE L’AIME PLUS SI ON ENLÈVE LE « M » TANT AIMÉ DU MOT « FAMILLE » CELA DONNE « FAILLE » IL FAUT SE LA DONNER CONTRE LES MALENTENDUS SORTIR LE SNIPER ESPÉRER LA PAIX CAR ÇA PUE DANS LA BOUCHE DES MICROS ÇA PUE SUR LES TOUCHES DES CLAVIERS ET SUR LES ÉCRANS DES TABLETTES LES CHAÎNES DE MAILS QU’ON REÇOIT SANS RIEN DEMANDER PUENT ET LES OREILLES SE BOUCHENT POUR NE PAS QUE ÇA SE BOUSCULE DANS LA TÊTE POUR NE PAS QUE ÇA RENVERSE LE SYSTÈME DE PENSÉE QUE L’ON S’EST FABRIQUÉ DEPUIS TANT D’ANNÉES ÇA PREND DU TEMPS DE SE CONSTRUIRE UNE FAÇON DE PENSER UNE FAÇON DE PARLER DE NOS JOURS ÇA MET PLUS DE TEMPS QUE DE SE FAIRE UNE OPINION ÇA REPRÉSENTE DES ANNÉES DE LECTURE OU D’ABSENCE DE LECTURE DES ANNÉES DE SOIRÉES RUQUIER OU CANAL + ET DES DIZAINES DE REPAS DE FAILLE ET DE FAMILLE DES HEURES DE BOULOT CUMULÉES ALORS POURQUOI RISQUER DE FOUTRE TOUT ÇA À LA POUBELLE – ON Y REVIENT – POUR UNE COMPLEXE HISTOIRE DE DIGNITÉ INTELLECTUELLE ?

109) TENIR. Se réveiller avec la voix de Rita du film Mulholland Drive qui susurre « Silencio… Silencio… » puis « go with me somewhere ».

110) TENIR. Je veux bien, mais pour aller où ma belle ?

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Pour une débénabarisation du quotidien est une liste écrite par Grégoire Damon (son blog) et moi-même en une forme de « passe-passe » : l’un complète l’autre. Les nouvelles lectrices et nouveaux lecteurs trouveront des explications ici.

Pour une débénabarisation du quotidien #93-99 et #100

Pour une débénabarisation du quotidien du #93 au #99 par Grégoire Damon c’est ici. Qu’il est sympa, il m’a laissé le #100 :

 

100) Les poubelles d’un jour plus un jour plus un jour. Les déchets de toute la chaîne de montage. Deux trois sacs lourds d’inutilités triées qu’on a pompé jusqu’à la moelle histoire de faire famille et tenir. Bocaux vidés jusqu’au verre. Bouteilles rincées. Conserves aux jus de légumes. Ampoules de sérum phy habitées par des restes coulants de nature sauvage. Morceaux d’ongles. Feuilles infusées. Brouillons. Mouchoirs. Noyaux d’olives. Plaquettes de pilules. Épluchures. Catalogues. Bref, de la preuve sociologique bonne qu’à inspirer les chanteurs de variété. Mais pas que : peut-être de la matière à nourrir la sculpture que l’on prépare dans le garage et que l’on compte bien envoyer sur le net en .SU. Peut-être que Génial le Poème a besoin des ordures de ses voisins pour se constituer un rêve. Ça descend sec en direction du local. Une marche puis une marche puis une marche. LOCAL POUBELLES : ça a moins de gueule que « Grande Décharge », même en lettres bâton. On dirait un vieux dialecte à la Yoda. Peut-être qu’en inversant… POUBELLES LOCALes. Là y’a un truc. Et c’est plus sympa que « déchèterie communale ». Là, on fait dans le local. On met en valeur la spécificité du coin. On est dans le terroir.

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Pour une débénabarisation du quotidien est une liste écrite par Grégoire Damon (son blog) et moi-même en une forme de « passe-passe » : l’un complète l’autre. Les nouvelles lectrices et nouveaux lecteurs trouveront des explications ici.

Pour une débénabarisation du quotidien #72-82 et #83-92

Pour une débénabarisation du quotidien du #72 au #82 par Grégoire Damon ici. La suite, la mienne ci-dessous :

83) PANNEAU BANDEROLE FUMÉE CRIS ENSEMBLE SLOGAN PANNEAU CRIS MANIFESTATION BANDEROLE SLOGAN VIE EN GRÈVE.

84) A l’arrêt tout simplement. Le Grand Rhône fait moins le malin. Qui ne saute pas sur place n’est pas lyonnais.

85) Note pour plus tard : en temps de grève faire liste de courses.

86) Liste de courses : gel hydroalcoolique (pour trinquer ; j’en aime l’odeur, la sensation de décès sur la peau, creuse-crevasse), ramasse-mort (modèle V.4 résiste au froid, réversible et compatible trottoir), architecture et rangements (pour classer les émotions d’une journée car là c’est trop le bordel), Revolver (l’album des Beatles), bombe lacrymogène à l’adoucissant « famille » (pour le dîner de Noël), boîte à gifles parfum diesel (pour se rappeler qu’on est toujours vivant, même en temps d’immobilisme), mobile musical pour adulte avec la chanson « encore un p’tit effort » (pour se donner du courage), lait frais demi écrémé, coupe-chiasse duo rose/bleu.

87) Je pense qu’avec tout ça, je suis armé pour décembre.

88) 2015 dépasse déjà du slip. 2015 fait déjà le plombier et nous montre sa raie.

89) « BIEN PROFOND, BIEN PROFOND, BIEN PROFOND » scandé dehors.

90) Fatigué.

91) Dehors me fait peur. Trop lisse à la fois trop rugueux. A l’écart quand ça goutte. Bien qu’au final nous nous prenions tous la même pluie.

92) Cette fin d’année m’inquiète. Dois trouver un moyen pour y voir clair. Y’a quoi derrière tout ça ? La Ville ressemble de plus en plus à la carte postale tapissée sur les murs de l’Office du Tourisme. J’assiste impuissant au spectacle. J’ai payé ma place. Taxe d’habitation t’as vu. Indignation de trentenaire mais qu’ai-je fait de ma connerie ?

Pour une débénabarisation du quotidien #67-71

67) C’est bien ! Bravo. Maintenant lâche la main. Vas-y lâche la main. Allé la main. Ouais. Vas-y. Ouais ouais c’est ça. Oui. Lâche. Lâche. Lâche prise. Lâche prise. C’est ça. Bravo ! C’est bien Papa, c’est bien.

68) C’était quoi ton métier quand t’étais jeune ? Jeune comment ? Jeune après le noir et blanc. Jeune en couleur quoi. Ben on n’avait pas vraiment de métier. On avait surtout des emplois. On cherchait un emploi. Ah. Non mais c’était sympa quand même. On faisait des trucs. Des trucs ? Oui des trucs. Du genre fallait écrire ça dans la case d’un feuillet pour que l’opération aboutisse. Construire des arrêts de tram avec des petits sièges espacés pour ne pas pouvoir s’allonger sous l’abri. Ou poser des questions fermées avec peu de lignes pour répondre. Le feuillet était en papier recyclé quand même faut pas déconner. Comme dans Hunger Games 9 ? Je ne sais pas je me suis arrêté. Au 4.

69) (Inspiré de faits réels) Tu lis quoi ? Gua. Et ça raconte quoi ? Gua. C’est bien ? Na dadada.

70) Sieste. A moi de vous réveiller.

71) Je sonne à la porte. Il sait que c’est moi. Je l’entends penser tout haut à travers le judas « putain c’est lui. J’espère qu’il ne va pas me parler poésie ». Il m’ouvre. Je me tiens debout sur son paillasson « wouaf wouaf ». Il me sourit alors que le reste de son corps semble tirer la gueule. Je lui lance : tu connais l’histoire de Génial le Poème ? Alors c’est Génial le Poème qui se ballade dans la rue. Soudain il tombe sur Paf le Chien et Flip-Flap la Girafe tous deux en train de se disputer la première place du classement de la meilleure vanne. Quand ces derniers le remarquent, ils s’immobilisent puis s’exclament en chœur « Génial le poème » ! A ces mots, le type se met à trembler. Un gigantesque trou noir commence à apparaître dans le novembre de sa tête. Le vortex grossit. Puis d’un coup, le type s’auto aspire. Se dissout en lui-même. Un temps. Puis plus rien. Je pense « OK un de moins » et barre un nom de ma death note.

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Ici la contribution précédente de Grégoire Damon : du #53 au #66.

Pour une débénabarisation du quotidien #53-66

Cher visiteur du présent qui désormais suit minutieusement la débénabarisation du quotidien,

Grégoire Damon vient de poster une suite qui dépote sur son blog : du #53 au #66

Bonne lecture !

Mais que vais-je répondre ?! Work in progress

 

PS : pour celles et ceux qui débarquent, le chantier Pour une débénabarisation du quotidien peut-être suivi ici ou ici.